mardi 12 novembre 2013

Snob est la nuit - prix de Flore 2013




Depuis 1994, cest le plus snob des prix littéraires. A lentrée du Flore, prière de montrer patte blanche. Sur le bristol dinvitation, on peut lire : « Tenue très tenue exigée ». Une certaine élégance est de mise : longues jambes sur stilettos pour les filles ; vestes ajustées pour les messieurs. La pluie ajoute une touche canaille aux « élus » qui patiente et bloque la rue Saint-Benoît. Un automobiliste énervé manque de renverser une demoiselle parée de noir. Il a la confondre avec la nuit, qui sétire en tenue étoilée. A lintérieur, la foule samasse. Les coupes de champagne, de la maison Roederer, sont sifflées à la vitesse grand V. De charmantes hotesses offrent un mystérieux breuvage, du même rouge que leur robe. Sur le palais : un grisant parfum de crèpe suzette. Côté buffet, il y en a pour tous les goûts : huîtres, pata negra découpé à la demande, foie gras, fromages. Yann Moix préfère picorer des fraises tagada. Il digère les 1143 pages de Naissance, prix Renaudot poids lourd. A 22 heures, une jeune femme allume une Vogue, gracile comme sa silhouette. Elle a un air de Françoise Sagan, millésime Bonjour tristesse. Sa blondeur et son sourire illuminent les volutes. Elle est la lauréate 2013 du prix de Flore, avec son roman Tout cela na rien à voir avec moi. Au micro, Frédéric Beigbeder, président du jury, lappelle. Monica Sabolo fend les corps agglutinés qui, à son passage, la félicitent. Un zeste taquin, Beigbeder précise que toutes les personnes présentes verront, doffice, leur signature parapher le « Manifeste des 343 salauds ». Nicolas Bedos, la tête ailleurs et migraineuse, nest pas venu. Au chant du coq, il naura pas à se renier une seconde fois. Les remerciements de Monica se perdent dans le brouhaha. Une femme, plus éprise de son chirurgien esthétique que de littérature, demande : « Qui a eu le prix ? » Son clone lui répond : « Monique quelque chose ... » La fête peut vraiment commencer.
Aux platines, en attendant DJ Cut Killer, Lou et Marine font grimper la température. Leur nom de scène, inscrit sur leurs T-Shirts blancs : La chatte de Françoise. Au son des Stooges, Gonzague Saint-Bris met le feu à la piste de danse. Jérôme Kerviel semble se demander ce quil fait là. Il aurait pu s’exiler au premier étage, où Laurence Remila, de la revue Schnock, parlait de Paul Gégauff. A deux heures du matin, les lumières se rallument. « Tous au Montana ! », crie Beigbeder. Une artiste italienne, mutine, préférerait se replier chez Lipp ; dautres se verraient plutôt chez Moose, rue des Quatre-vents, à déguster une bouteille de Dilettante de Catherine et Pierre Breton. On les comprend : rentrer au Montana savère un combat autrement plus féroce quobtenir le prix de Flore.
 
Texte paru dans Le Figaro, le 12/11/2013

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